Maître Coq

Engagé aux côtés de Yannick Bestaven sur Maître Coq IV, Roland Jourdain, alias Bilou  pointe à une très belle quatrième place au passage de la seconde marque des 48 Heures Azimut. Il évoquait avant le départ l’évolution des fantastiques machines que sont devenues les IMOCA qu’il pratique depuis 20 ans.

Quel est ton dernier souvenir du Défi Azimut ?

La dernière fois que je l’ai couru, c’était comme media-man avec Morgan. J’avais mon casque de l’ONU et le droit de ne rien faire ! Là, je reviens aux manettes avec Yannick. C’est un événement sympa, à côté de la maison, donc dans le cadre de l’économie circulaire qui nous tient à cœur chez Kairos, c’est super ! L’organisation est sympa, c’est technique, sportif, ils annoncent du vent et je pense que dimanche, tout le monde sera bien crevé !

Comment tu situes Maître Coq par rapport à la concurrence ?

Le bateau n’a pas beaucoup évolué, mais il est fiable et reste performant. Nous avons accumulé pas mal d’entraînement en avant-saison à Cascaïs et couru le Fastnet. Il nous reste à valider notre nouveau pilote mais sur le plan architectural, il n’y a pas eu de gros changement. On aurait bien voulu installer le réglage d’incidence des foils (« rake ») mais il fallait modifier les puits et c’était trop couteux. Nous serons certainement frustrés à certaines allures où des bateaux comme Charal ou Arkea Paprec sont vraiment impressionnants. Archimède reste chez nous et eux s’envolent ! L’écart peut atteindre 4 nœuds tout de même, c’est beaucoup… On le savait un peu déjà, un moineau, va moins vite qu’un albatros !

Depuis 20 ans, tu as connu toutes les générations de d'IMOCA, la courbe de progression est étonnante ?

C’est rigolo, car on a le Pingouin (son tout premier plan Lombard qui date de 1998 NDLR) d’Alexia Barrier dans notre chantier Kaïros. Je suis rentré dedans hier et c’est là que tu mesures le chemin parcouru. Cette année, on passe un nouveau cran et la qualité du vol ne va cesser de s’améliorer. La question des plans porteurs sur les safrans est la prochaine étape et va encore accroître les performances globales. Et les architectes progressent aussi. La question de la déformation des foils sous la charge est mieux appréciée pour trouver une sorte d’autorégulation à la manière d’un épervier. L’acquisition des données et leur traitement instantané est aussi un domaine dans lequel la marge de progression est importante. C’est une question générationnelle. Les jeunes skippers et les teams sont très impliqués et performants là dedans.

 

Et toi, tu sens les années qui passent quand tu es à bord ?

Ecoute, à 55 ans, ça va encore ! J’ai sans doute un peu moins de tonus mais je le récupère  par une forme de sagesse ou d’expérience et j’ai l’impression de mieux intégrer la difficulté, de gérer mon effort.

 

Tu travailles notamment chez Kaïros sur les bio-composites, que penses-tu de ces machines très consommatrices de carbone ?

Je cultive allègrement ma schizophrénie ! D’un côté le goût pour la performance et de l’autre, la réflexion sur le monde de demain et le coup d’après.  Les IMOCA sont le reflet de l’époque actuelle dans sa globalité. Plus tu accélères, moins tu regardes sur les côtés ! Ça me questionne bien sûr, mais c’est vrai que je m’éclate toujours à bord. Les nouveaux bateaux sont très attirants, ça pousse, ça va plus vite, c’est une drogue dure.